Sommaire du numéro 129
- Editorial de Francis DASPE : « Emmanuel Macron ou les cruelles limites de l’usage circonstanciel du plan B» page 2
- Dossier Laïcité François COCQ, Francis DASPE page 3
- Texte de Jean-Michel DEJENNE: « La Catalogne, heure de vérité de l’Europe ? » page 7
- Texte de Céline PIOT : « La réhabilitation des Fusillés pour l’exemple une fois encore refusée» page 9
- Communiqué de l’AGAUREPS-Prométhée : « Vraiment le Président des riches… » page 11
- Agenda et Librairie de l’AGAUREPS-Prométhée : Perpignan, Bazas, Mont-de-Marsan – « La Révolution citoyenne au cœur » page 12
- Une fiche d’adhésion (facultative mais conseillée…) pour 2017 page 14
Emmanuel Macron ou les cruelles limites de l’usage circonstanciel du plan B
Emmanuel Macron n’a pas été élu simplement sur un malentendu. Il a bénéficié à la fois d’un incroyable concours de circonstance et d’un vaste plan concerté. Les deux éléments ont concouru à une forme d’envoûtement macronien.
Le plan concerté l’a propulsé ultime rempart du système qu’il a pourtant affecté de dynamiter. Le désormais « Président des riches » a d’abord été « l’enfant chéri de l’oligarchie ». Simple renvoi d’ascenseur aujourd’hui. L’incroyable concours de circonstances a transformé au fur et à mesure des événements le candidat Macron en plan B universel pour divers courants en déshérence.
La défaite d’Alain Juppé à la primaire de la droite explique le ralliement des centristes de François Bayrou et au-delà. Le programme clivant de François Fillon et l’entêtement de sa lente agonie dans les affaires ont conduit le Medef à opter pour un candidat plus apaisant, mais non moins déterminé à casser le pacte républicain et social. Le résultat de la primaire socialiste et écologiste a décomplexé les sociaux-libéraux bien au-delà de Manuel Valls. La poussée dans l’abîme du Président sortant aussi bien par la direction du Parti socialiste avec l’invention de la primaire, les gesticulations des frondeurs et l’ultime coup de pied de l’âne de son Premier Ministre ont conduit nombre de hollandistes à voter pour celui qui trahissait pourtant leur champion.
Il y a là l’illustration du grand écart du célèbre « et en même temps ». Au second tour, Emmanuel Macron fut en quelque sorte le plan B pour une forme de « front républicain » contre Madame Le Pen. Avec en prime l’imposture flagrante de la malhonnêteté intellectuelle : la récupération politicienne d’un vote de circonstance pour accréditer la thèse de l’acceptation supposée automatique de la totalité de son programme.
De la même manière que la somme des intérêts particuliers ne constitue pas un intérêt général, le caractère hétéroclite de ces multiples « plan B » ne font pas d’Emmanuel Macron le plan B du peuple. Au contraire, l’exercice du pouvoir est impitoyable. L’armure se fend. Le mépris de classe et les multiples saillies contre « les gens de rien » prouvent qu’il s’agit d’une politique au service des oligarchies. L’envoûtement macronien se dissipe à mesure que sa base sociale se rétrécit. Emmanuel Macron est rattrapé par le vieux monde de ses prédécesseurs qui ont échoué à se faire réélire. Le style nouveau fondé sur la jeunesse pour seul argument le déporte vers une « giscardisation accélérée ». Le volontarisme jupitérien et bling-bling par sa méconnaissance des réalités populaires le conduit vers une « sarkozysation » inéluctable. L’inféodation aux intérêts de la finance débouche en fin de compte sur une « hollandisation » stérilisante.
En cette année de centenaire de la révolution d’octobre 1917, face à l’ébranlement du vieux monde incarné par le Président Macron, l’alternative réside dans la réalisation de la révolution citoyenne située au cœur du programme « L’Avenir en commun » porté par La France Insoumise.
Francis DASPE 03 / 11 / 2017
Dossier Laïcité Macron
1° tribune : Manuel Valls, le contorsionniste de la laïcité
Il s’agit d’une tribune diffusée sur le site de Marianne le 17 octobre 2017.
https://www.marianne.net/debattons/tribunes/manuel-valls-le-contorsionniste-de-la-laicite
François Cocq et Francis Daspe sont respectivement président et secrétaire général de l’AGAUREPS-Prométhée. François Cocq est par ailleurs co-auteur de La laïcité pour 2017 et au-delà, de l’insoumission à l’émancipation (Eric Jamet éditions, 2016).
Ces derniers jours, le débat laïque a de nouveau fait irruption sur le devant de la scène. Nous pourrions être tentés de considérer qu’il s’agit d’une bonne chose tant cette question est restée désespérément absente de la campagne présidentielle. Il ne faut pourtant pas s’y tromper. Si la laïcité se retrouve à nouveau au cœur des débats, c’est pour mieux être instrumentalisée une fois encore par ceux qui s’en réclament indûment et cherchent à affaiblir la cause qu’ils affectent de vouloir défendre. Manuel Valls est de ceux-là.
Ainsi, l’ancien Premier ministre s’est-il reconverti en pointe avancée de la macronie pour lancer l’assaut à l’endroit de Jean-Luc Mélenchon et de La France insoumise. Le terrain de bataille choisi ? La laïcité bien sûr. Non que Jean-Luc Mélenchon puisse être taxé d’une quelconque faiblesse ou complaisance en la matière, Manuel Valls le sait bien. Jean-Luc Mélenchon est ainsi le seul candidat à avoir signé durant la présidentielle aux côtés des principaux représentants du camp laïque L’appel des laïques, pour le respect de la laïcité. Le programme de la France Insoumise est pareillement le seul à proposer à la fois un livret thématique sur la laïcité dans lequel figurent des propositions de respect et d’extension de la laïcité avec notamment l’application de la loi de 1905 sur tout le territoire et donc l’abrogation du concordat en Alsace-Moselle, la fin du financement public pour l’enseignement confessionnel privé par l’abrogation de la loi Debré de 1959, le refus des financements publics pour les constructions d’édifices religieux ou des activités cultuelles, ou encore le refus définitif du titre de chanoine de Latran pour le Président de la République.
On peut évidemment comprendre que Manuel Valls ne partage pas ces orientations, lui qui, contrairement à ce qu’indique l’article 2 de la loi de 1905, lançait le 2 août 2016 dans Libération « qu’il ne fallait pas interdire une forme de financement public » concernant les mosquées, lui qui en tant que Premier ministre assistait le 27 avril 2014 à la canonisation des papes Jean XXIII et Jean-Paul II au Vatican, lui dont le parti d’alors, le PS, exprimait dans un communiqué du 26 février 2015 qu’il faut « un développement de l’enseignement privé confessionnel musulman ». Manuel Valls a beau jeu de dénoncer l’islamo-gauchisme quand les ramifications de l’affaire Lafarge en Syrie dévoilent chaque jour un peu plus l’islamo-affairisme qui s’est insinué jusqu’aux plus hautes sphères du pouvoir alors même qu’il était Premier ministre. Celui-là préfère la sainte-alliance des libéraux et des communautaristes qui segmentent et désagrègent de concert, chacun dans leur registre, la société, l’intérêt général et les principes républicains. Deux faux universalismes, le marché et la religion, qui procèdent tous deux de prétendues mains invisibles qui invalident la notion même de raison.
Alors, parce que l’invective vallsiste vise en fin de compte au déni du débat argumenté fondé sur la Raison, l’ancien Premier ministre devient l’exécutant idéal pour activer la basse manœuvre politicienne. La stratégie décomplexée adoptée par Manuel Valls est de nature orwellienne. Il attaque la France Insoumise, non pas sur un éventuel point faible, mais au contraire sur un des éléments qui la fonde et lui est consubstantiel. Le stratagème consiste à brouiller les repères les mieux établis et les plus indiscutables.
Ce faisant, c’est tout le camp laïque que Manuel Valls fait reculer sans s’en émouvoir. Quelle drôle d’idée de s’en prendre au mouvement qui, par la dynamique populaire qu’il est capable de lever, a permis l’adhésion partagée du grand nombre autour du programme le plus laïque de la présidentielle, au mouvement qui a permis la fortification d’un sens commun laïque et républicain, au mouvement qui a permis aux questions laïques de progresser et d’imprégner plus largement dans la société. Pendant ce temps, Manuel Valls, déclamait dans L’Express le 23 août 2016 que « l’élection présidentielle va se jouer sur la place de l’islam ». Il aurait alors fallu débattre du degré d’immixtion du temporel dans le spirituel comme le préconisait Manuel Valls lorsqu’il considérait qu’« il y a urgence à bâtir un pacte avec l’islam » ? Faudrait-il au nom de la lutte contre l’islamisme djihadiste, faire place au sein de la République à l’islam politique ? Non ! L’Etat n’a pas à répondre au piège qui consiste à participer à la dispute politico-théologique engagée au sein de l’Islam comme il n’a rien à voir avec quelque cléricalisme que ce soit, a fortiori lorsqu’il s’agit d’extrêmes-droites religieuses.
La laïcité n’est ni l’œcuménisme, ni la neutralité. Elle n’est ni une opinion, ni une valeur. C’est un principe d’organisation sociale et politique, le principe d’organisation qui assure le plus haut degré de liberté pour tous grâce au fait qu’elle garantit la liberté de conscience promue dans un Etat de façon universelle (et donc bien évidemment pour ceux qui pratiquent l’Islam), mais aussi parallèlement la stricte séparation entre la société civile d’une part et les sphères de l’autorité politique et de constitution des libertés de l’autre (école, services publics, protection sociale). Elle stipule l’égalité en récusant discriminations et inégalités sociales. Elle assure la fraternité en créant un espace commun par delà les différences. Parce qu’elle refuse enfin tout préalable religieux pour adhérer à la communauté politique des citoyens, elle fonde la souveraineté populaire en indiquant que les Hommes peuvent se gouverner par eux-mêmes de manière rationnelle et terrestre. C’est beaucoup, et apparemment trop pour certains.
François COCQ, Francis DASPE
2° tribune : Le chanoine de Latran confond laïcité et œcuménisme
Il s’agit d’une tribune diffusée sur le site de Marianne le 3 novembre 2017.
https://www.marianne.net/debattons/tribunes/le-chanoine-de-latran-macron-confond-laicite-et-oecumenisme
François COCQ est Président de l’AGAUREPS-Prométhée et co-auteur de « La laïcité pour 2017 et au-delà, de l’insoumission à l’émancipation » (Eric Jamet éditions, 2016).
Dans son édition du 2 novembre, le journal La Croix révélait que, par une lettre au chapitre de la basilique Saint-Jean-de-Latran, M. Macron acceptait officiellement son titre de « premier et unique chanoine honoraire » de cette basilique romaine cathédrale du pape, et qu’il a bien l’intention d’aller en prendre rapidement possession à Rome.
Voilà donc le président de la République qui renoue avec les mauvaises habitudes qui veulent que le chef de l’Etat se pare également du manteau du religieux. C’est une mauvaise façon de faire et plus encore un détournement de la laïcité au bénéfice d’une lecture régressive qui y substitue l’œcuménisme communautariste.
Macron n’était pas tenu d’accepter cette « distinction ». D’autres, François Mitterrand, Georges Pompidou ou encore François Hollande, n’ont pas pris officiellement possession de leur titre à défaut d’y avoir renoncé. Si la France n’a pas à renoncer à son Histoire, la République n’a pas à endosser les héritages qui entrent en contradiction avec son principe d’organisation politique et sociale que représente la laïcité.
Membres d’un même corps politique, les individus peuvent être croyants, athées ou agnostiques, libre penseurs. Mais la laïcité transcende ces appartenances. On pourrait en effet être athée et laïque comme athée et non laïque ; agnostique et laïque comme agnostique et non laïque ; croyant et laïque comme croyant et non laïque. La République a fait un choix en conscience et en raison : celui d’assumer en son sein le principe de laïcité. Et donc de faire la place aux croyants, aux athées et aux agnostiques. C’est pour cela qu’elle affiche de manière première le fait d’assurer d’abord la liberté de conscience qui est une liberté de croire ou de ne pas croire.
L’Etat doit demeurer extérieur aux considérations théologiques
La liberté de conscience détermine le rapport de l’Etat à l’ensemble des religions en général et à chacune d’entre elles en particulier. La conscience n’est pas la foi et l’égalité entre les citoyen-ne-s justifie donc que l’Etat demeure extérieur aux considérations théologiques et à leurs pratiques. La liberté de conscience ne vise en effet pas à un égal traitement des religions, œcuménisme faussement laïque tant vanté dans la période. Il observe sur ce point non pas une neutralité entre les religions mais une stricte séparation entre le fait religieux et le champ politique.
Voilà pourquoi il est aussi choquant d’entendre ce lundi Gérard Collomb, ministre d’Etat, de l’intérieur et en charge des relations avec les cultes, affirmer « Nous voulons que les musulmans se sentent fiers d’être français, fiers d’appartenir à la nation » et mettre ainsi sur le même plan la religion, qui relève de l’intime, et la nationalité, qui définit le peuple comme un corps politique constitué justement sur la base du principe de laïcité.
Pierre jetée dans le jardin de la laïcité
Voilà pourquoi la reconnaissance officielle par M. Macron du titre de chanoine de Latran est une pierre jetée dans le jardin de la laïcité et donc dans celui de tous les Français-es.
Voilà pourquoi la distribution des reconnaissances organisées par M. Macron et ses ouailles, un coup à une religion, un coup à une autre, n’est au final rien d’autre qu’une gestion communautariste larvée qui affaiblit et pervertit la République.
François COCQ
La Catalogne, heure de vérité de l’Europe ?
La crise catalane est peut-être un événement dont nous ne mesurons pas l’ampleur de la portée.
La détermination du président catalan Carles Puigdemont peut servir d’exemple à plusieurs mouvements séparatistes en Europe, et celle tout aussi manifeste du premier ministre espagnol Mariano Rajoy peut susciter bien des élans de sympathie voire de solidarité au-delà des rangs séparatistes. Ajoutons à cela que l’indépendance catalane peut faire tâche d’huile dans les Pyrénées-Orientales et ainsi exciter les mouvements unionistes, comme cela pourrait se passer avec le Pays-Basque.
Et si, alors que la vague écologiste semble passée de mode, alors que l’on constate la force électorale des extrême-droites en Europe, que l’on devise sur une éventuelle montée en puissance des gauches radicales à l’exemple de Syriza, Podemos, La France Insoumise (sans oublier le maintien de Die Linke, qui a gagné des voix lors des élections au Bundestag), alors que l’on croit déceler un potentiel des partis animalistes, si finalement c’était une vague régionaliste-autonomiste-indépendantiste-séparatiste qui venait animer et bousculer le paysage électorale européen dès les prochains mois ?
Voilà pour les conséquences possibles à l’intérieur des Etats en Europe. Mais pour l’heure, c’est bel et bien non tant l’Espagne que l’Union européenne que cette crise met au pied du mur. C’est d’ailleurs sans doute la crise politique la plus grave qu’elle a rencontrée dans son Histoire. Même les épisodes référendaires l’étaient moins car ils ne mettaient en péril que le rythme de l’intégration, pas la constitution (à tous les sens du terme) de l’Union. Même le Brexit est moins problématique, puisqu’il ne remet pas en cause la morphologie ni la philosophie du bloc résiduel, et enregistre certes un départ inédit et indésiré, mais d’un acteur qui ne fut jamais le plus impliqué, comme il n’est pas non plus partie prenante de la zone Euro.
Avec l’affaire catalane, le visage de l’UE est à nu, le masque tombe une deuxième fois, et plus nettement encore que dans la crise grecque. Avec la Grèce, la dimension économique et monétaire était prégnante, et si l’UE est apparue comme implacable et indifférente aux choix démocratiques répétés, le discours culpabilisant sur la gestion de cet Etat a contribué à faire passer la pilule auprès des peuples de l’Union, même si cela n’a pas conforté son déjà bien entamé capital (kapital) sympathie.
Le feuilleton auquel nous assistons avec la déclaration d’indépendance catalane est bien différent. Voilà une région riche, dotée d’une capitale, Barcelone, qui est l’une des villes les plus touristiques et les plus « tendance » de toute l’Europe voire sa vitrine de jeunesse, d’ouverture et de modernité. Une région à l’identité affirmée, à commencer par sa propre langue d’usage quotidien (et non un vestige ou un enjeu strictement patrimonial comme ailleurs parfois). Une région qui annonce la couleur depuis des années quant à ses velléités séparatistes de l’Espagne (au point que les indépendantistes y recueillent 47% des voix) et qui organise un référendum, procédure dont le caractère démocratique fait partie des fondements politiques et juridiques de l’UE.
Et voilà que le gouvernement espagnol, déjà discrédité par l’affairisme et sa gestion de la crise de 2008 dont les effets se poursuivent encore, emploie la force pour empêcher le déroulement du scrutin, puis refuse d’en reconnaître le résultat, puis prend le contrôle de certains médias et en bâillonne d’autres, procède à la pénalisation du processus, de ses acteurs et même au placement en détention de plusieurs d’entre eux, dont des ministres. Le président Puigdemont se trouve réfugié en Belgique où il plaide sa cause devant les instances communautaires (car il veut adhérer à l’UE, et non la quitter), lorsqu’arrive un embarrassant mandat d’arrêt européen à son encontre. Cette brutalité que l’on nous présentait comme totalement révolue et devenue impossible dans l’Europe de la paix, des droits de l’Homme et de la démocratie, se déploie bien sous nos yeux. La politique effectue un retour en force, au sens propre, s’offre à voir dans son essence et son âpreté, et surtout fait pour la première fois vraiment irruption sur la scène européenne communautaire.
Cette heure de vérité se révèle alors des plus cruelles. La totalité des dirigeants des Etats-membres se rangent comme un seul homme derrière le gouvernement espagnol. Pas une nuance, pas une once de compréhension ou de compassion, pas un semblant de diplomatie. Certes, les Etats sont par nature conservateurs, et d’abord sur les questions territoriales, puisqu’il en va de leur intégrité. Mais l’Union n’allait-elle pas temporiser, déroger à cette réaction intergouvernementale? C’eût été certes ajouter la crise à la crise, mais la sévérité des propos de Jean-Claude Juncker, dénonçant l’irresponsabilité de cette indépendance et déclarant qu’il ne voulait pas « gérer une Europe à 95 Etats» est tout de même surprenante. C’est là que le masque de la belle Europe des libertés tombe totalement. L’UE, qui n’a eu de cesse de flatter les régionalismes, de saper les Etats-nations de l’extérieur par les abandons de souveraineté, de l’intérieur par les actions à grande publicité du Feder, le soutien à la charte des langues régionales, le discours de l’Europe sans frontières intérieures, de la fraternité et même de la citoyenneté européennes, etc. cette UE balaie tout cela d’un brusque revers de manche, d’un rageur coup de menton.
Depuis 60 ans les tribunes, les colloques, les manifestations, les débats, les référendums, les élections, les négociations, les politiques austéritaires, l’indifférence humanitaire (en Méditerranée)… n’ont réussi au mieux qu’à ralentir l’intégration communautaire européenne. Cette Europe a toujours gagné car les Européens, même déçus, même critiques, même furieux, continuaient à croire à sa nature la plus précieuse, celle de la liberté individuelle de ses ressortissants. C’est pourquoi la crise catalane, en mettant sans fard au grand jour son visage intrinsèquement conservateur, autoritaire, au service exclusif du commerce et de la finance, sera peut-être la surprise de l’Histoire qui mettra l’Union européenne à bas.
Jean-Michel DEJENNE 05 / 11 / 2017
La réhabilitation des « Fusillés » pour l’exemple » une fois encore refusée
Céline PIOT est co-secrétaire départementale du Parti de Gauche dans les Landes et conseillère municipale « Mont2Gauche » à Mont-de-Marsan. Elle est aussi déléguée territoriale de l’AGAUREPS-Prométhée.
Il paraît qu’avec La République en Marche, la rupture avec le « vieux monde » est en cours. Depuis qu’Emmanuel Macron a été élu président de la République, il est permis d’en douter : la politique menée n’est qu’une grossière application en accéléré des idées néolibérales imposées par la doxa européenne depuis une trentaine d’années, et les pratiques politiciennes n’ont rien de nouveau (la nomination déguisée en élection de Christophe Castaner comme délégué général du mouvement n’en est qu’un exemple parmi tant d’autres). Dans beaucoup de domaines, Emmanuel Macron emboîte le pas aussi bien à François Hollande qu’à Nicolas Sarkozy (politique d’austérité, casse du modèle social français, destruction de la démocratie sociale et des solidarités territoriales, etc.).
Le refus de rendre la justice aux 639 « Fusillés pour l’exemple » est une nouvelle preuve qu’il n’y a aucune différence dans la pensée de ces responsables politiques hélas interchangeables. Par la voix de Geneviève Darrieussecq, secrétaire d’État aux Armées, le gouvernement Philippe, comme ses prédécesseurs, dénie la réhabilitation morale et politique aux soldats considérés « coupables de désobéissance militaire » durant la Grande Guerre. Il s’inscrit dans le sillage de la Chambre « bleu horizon » élue en 1919 qui avait refusé de rendre leur honneur aux victimes françaises des balles françaises. Il faut savoir que, à ce jour, seuls 40 des 639 « Fusillés pour l’exemple » ont été réhabilités. La secrétaire d’État a écarté la réhabilitation sous prétexte que la réhabilitation juridique au cas par cas n’est pas possible.
Cet argument est inconvenant car ce n’est pas ce qui est demandé depuis plusieurs décennies par diverses associations (ARAC, Libre Pensée, Mouvement de la Paix, des sections de la Ligue des Droits de l’Homme…) ; ce n’est pas ce qui est demandé non plus par 31 conseils départementaux, 6 conseils régionaux et près de 2 000 conseils municipaux ; ce n’est toujours pas ce qui est demandé par les descendants des « Fusillés pour l’exemple ». Et ce n’est pas ce que viennent de demander les députés Alexis Corbière (La France insoumise) et Jean-Paul Dufrègne (PCF, groupe Gauche démocrate et républicaine) devant l’Assemblée nationale. Ce qui est demandé est la réhabilitation collective.
Lors de son audition devant la Commission de la défense nationale et des forces armées le 4 octobre 2017, Geneviève Darrieussecq avait apporté la même réponse à Christophe Lejeune (LREM) qui lui proposait – à elle qui venait pourtant de rappeler de façon très conventionnelle, voire artificielle, que les commémorations liées au centenaire de la Grande Guerre permettent de « rendre hommage aux blessés et morts tombés pendant ce conflit mondial » –, de profiter de ce cycle mémoriel pour réhabiliter les « Fusillés pour l’exemple » dont leur nom, de fait, ne peuvent être inscrits sur les monuments aux morts.
La suite de la réponse révèle non seulement un grand manque de connaissances mais aussi un très grand mépris. Pour la secrétaire d’État, « la réhabilitation mémorielle est en cours » en raison de l’existence du site Internet « Mémoire des hommes » qui « aborde très concrètement le sujet » et du Musée de l’Armée qui « consacre une salle très riche aux fusillés de la Grande Guerre ». En outre, alors qu’avant « on n’en parlait pas », grâce à François Hollande, qui, en 2017, a évoqué les « Fusillés pour l’exemple », désormais « on en parle, et c’est déjà une réhabilitation. »
Il nous faut donc expliquer ici plusieurs éléments à Madame la Ministre, décidément mal (ou volontairement mal) informée.
Premièrement, « on parlait » des « Fusillés pour l’exemple » bien avant François Hollande. Nous pouvons rappeler l’intervention de Lionel Jospin à Craonne en 1998, les ouvrages des historiens sur le sujet (notamment ceux de Nicolas Offenstadt et du général André Bach) ou encore le film Les Sentiers de la gloire, ce chef-d’œuvre cinématographique de Stanley Kubrick (1957) censuré en France pendant dix-huit ans, et aussi tout le travail dans les années vingt et trente de Blanche Maupas et des trois autres veuves de caporaux de Souain afin d’obtenir la réhabilitation de leur mari « fusillés pour l’exemple » parce que le 336e régiment d’infanterie avait refusé en mars 1915 de repartir une nouvelle fois « à l’abattoir ».
Deuxièmement, pour réhabiliter ces victimes de la justice militaire pour qui l’intimidation devait servir à forcer l’obéissance, il ne suffit pas de « parler » et encore moins de renvoyer à un site Internet, fût-il bien réalisé ; il faut agir ! Lors de la campagne présidentielle de 2012, François Hollande s’était engagé à réhabiliter collectivement les « Fusillés pour l’exemple » ; mais, une fois élu, il n’a pas tenu cet engagement. Il faut dire que François Hollande n’en était pas à un reniement de plus… Avec son discours du 16 avril 2017 prononcé lors du centenaire de la bataille du Chemin des Dames au cours duquel il a minimisé les raisons des mutineries en quoi il a simplement vu « le vacillement d’un instant », il est allé encore moins loin que Nicolas Sarkozy ; c’est dire ! Et quand la secrétaire d’État se satisfait de l’intégration de la question des « Fusillés pour l’exemple » au sein du Musée de l’Armée, feint-elle d’ignorer qu’il s’agit là d’un nouveau déni de justice, les victimes y côtoyant les généraux fusilleurs ?
Mais Geneviève Darrieussecq n’en est pas à une faute politique près. Lorsqu’elle était maire de Mont-de-Marsan (de mars 2008 à juillet 2017), elle a toujours refusé de supprimer l’office religieux (forcément une messe catholique…) du programme municipal des commémorations officielles du 11-Novembre et du 8-Mai. Pour justifier l’injustifiable – c’est-à-dire ne pas respecter la loi de Séparation de 1905 et oublier la neutralité des élus de la République, – ses arguments ont été tout aussi navrants et politiquement pauvres que ceux apportés au refus de vouloir réhabiliter les « Fusillés pour l’exemple » : « Mon prédécesseur faisait de même… Les soldats étaient tous croyants… Si vous n’avez que cela à me reprocher… »
Ceux qui sont morts non pour la Patrie mais par la Patrie méritent mieux qu’une énième réponse hors-sujet !
Céline PIOT 07 / 11 / 2017
Communiqué de l’AGAUREPS-Prométhée : Vraiment le Président des riches…
Emmanuel Macron est bien le Président des riches. La réforme de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF), transformé en impôt sur la fortune immobilière (IFI), le montre clairement.
Le subterfuge vise à exonérer les plus riches de leur devoir fiscal et de leur obligation de solidarité. Le cas des Pyrénées-Orientales l’illustre. Le manque à percevoir pour les caisses publiques est estimé à 6 millions d’euros, soit quasiment la moitié de ce que permettait de faire rentrer l’ISF.
Cette mesure équivaut en réalité à un immense transfert de richesses au profit des plus aisés. Elle s’ajoute à d’autres dispositions du même acabit. Dans un département comme les Pyrénées-Orientales touché de plein fouet par la pauvreté et la précarité, la situation devient véritablement indécente.
L’AGAUREPS-Prométhée dénonce cette politique de classe décomplexée, prenant l’argent des plus pauvres pour le redistribuer aux plus riches, exonérant les plus aisés pour faire payer les plus modestes.
L’AGAUREPS-Prométhée milite pour une fiscalité davantage progressive avec le retour pour l’impôt sur le revenu à plus d’une dizaine de tranches, une taxation accrue de tous les revenus du capital, une diminution en conséquence de la part des impôts proportionnels comme la TVA et de celle des impôts locaux.
C’est à ces conditions qu’une réelle redistribution des richesses pourra s’effectuer dans la perspective d’une plus grande justice sociale, à l’opposé des choix actuels du « Président des riches ».
Francis DASPE, Secrétaire général de l’AGAUREPS-Prométhée le 26 / 10 / 2017
Agenda AGAUREPS-Prométhée Réunions Bazas, Perpignan, Mont-de-Marsan
▲ Perpignan, mercredi 22 novembre 2017
Salle des Libertés (3 rue Bartissol), à 19 heures
Conférence / débat avec Mickaël IDRAC sur le thème « Migration(s) et droits de l’enfant : des entrelacs aux entrechocs ». Il mettra particulièrement en exergue les contradictions des politiques migratoires européennes qui se déclarent protectrices en un territoire ostensiblement multiculturel tout en entretenant des moyens légaux de violer les textes internationaux relatifs aux droits de l’enfant et notamment au droit à l’éducation.
▲ Bazas, samedi 25 novembre 2017
Salle des Permanences, place de la Cathédrale, à 19 heures
Conférence / débat avec Francis DASPE qui présentera son nouveau livre « La Révolution citoyenne au cœur » (Eric Jamet éditeur, octobre 2017).
Les deux sous-titres donnent un aperçu du contenu et des objectifs de l’ouvrage : « Brève histoire subjective du Parti de Gauche » et « Renverser la table avec La France Insoumise ! ».
▲ Mont-de-Marsan samedi 9 décembre 2017
Maison des associations (39 rue Martin Luther King, ancienne caserne Bosquet), salle de réunion du rez-de-chaussée du bâtiment Joëlle Vincens, à 14 heures 30
Conférence / débat avec Francis DASPE qui présentera son nouveau livre « La Révolution citoyenne au cœur » (Eric Jamet éditeur, octobre 2017).
Les deux sous-titres donnent un aperçu du contenu et des objectifs de l’ouvrage : « Brève histoire subjective du Parti de Gauche » et « Renverser la table avec La France Insoumise ! ».
Sortie en librairie : « La Révolution citoyenne au cœur » (Francis DASPE)
Le dernier livre de Francis DASPE vient de sortir. Il est intitulé « La Révolution citoyenne au cœur » (Eric Jamet éditeur, octobre 2017). Les deux sous-titres donnent un aperçu du contenu et des objectifs de l’ouvrage : « Brève histoire subjective du Parti de Gauche » et « Renverser la table avec La France Insoumise ! ».
La création du Parti de Gauche à la suite de la sortie du Parti Socialiste en novembre 2008 de Jean-Luc Mélenchon a modifié en profondeur l’échiquier politique à gauche. La stratégie du Front de Gauche a été porteuse d’espoir jusqu’à la présidentielle de 2012. Mais les stratégies à géométrie variable des autres partenaires lors des élections locales en ont eu raison.
Le Parti Gauche, inlassable artisan de l’unité et gardien vigilant de la cohérence politique, a persisté dans le choix de la révolution citoyenne en se lançant dans le mouvement de La France Insoumise en 2016 en vue de la présidentielle qui s’annonçait. La priorité donnée à fédérer le peuple sur rassembler la gauche s’est avérée payante avec la campagne propulsive de 2017.
Cet ouvrage retrace les grandes lignes de l’histoire accélérée du Parti de Gauche qui n’a pas été un simple « un parti de plus à gauche ». Il ouvre également des perspectives pour le développement du mouvement de La France Insoumise. La révolution citoyenne serait-elle à portée de main ?
Francis DASPE est membre du Parti de Gauche depuis sa création en 2008. Il y exerce des fonctions locales (secrétaire départemental dans les Pyrénées-Orientales) et nationales (président de la Commission Éducation). Il est également secrétaire général de l’AGAUREPS-Prométhée (Association pour la gauche républicaine et sociale – Prométhée). Il est impliqué dans le mouvement de La France Insoumise depuis son lancement en février 2016.